Durée : 2h40 avec entracte
Cavalleria Rusticana
Mélodrame en un acte
Musique Pietro Mascagni
Livret Giovanni Targioni-Tozzetti et Guido Menasci
Création : Rome, 1890
Pagliacci
Drame en deux actes
Musique et livret Ruggero Leoncavallo
Création : Milan, 1892
« La fiction est fiction. Appeler une histoire, histoire vraie, c'est faire injure à la fois à l'art et à la vérité ». Nabokov
Note d'intention d'Éric Perez
La jalousie lui crèvera le cœur, le soleil lui brûlera les yeux.
La jalousie, cette lumière aveuglante, cette douleur terrible au creux de la poitrine, cette pression si intense qui vous donne envie de tuer, c’est une histoire simple et banale. Nous allons relater deux drames de la jalousie, deux faits divers violents, tels qu’on peut les lire dans les journaux, tels qu’on peut les voir de nos jours sur les chaines d’informations, avec leurs témoignages sordides, leurs images obscènes. Ces drames, ces faits divers ont toujours été des spectacles pour les voyeurs que nous sommes.
C’est une histoire « vraie » que nous allons raconter avec Cavalleria Rusticana et Pagliacci . Le vérisme est un terme provenant de l’italien verismo à partir de « vero » qui signifie « vrai », le héros vériste est un homme du peuple aux antipodes du héros mythique.
Le théâtre vériste se déroule dans un cadre réaliste avec des situations de la vie quotidienne, il décrit un monde rural écrasé par le soleil, dominé par les passions et la violence.
Les auteurs se sont inspirés de la vérité mais où est la vérité quand le héros représenté se tourne constamment face au public pour s’exprimer dans un langage, le chant lyrique, qui va à l’encontre du vraisemblable ? L’opéra est le genre conventionnel par excellence.
Mais n’est ce pas dans la convention, dans le factice, que se trouvent la source, l’origine de nos émotions les plus « vraies ». « Le simulacre est vrai »
« Le théâtre n'est pas le pays du réel…. C'est le pays du vrai : il y a des cœurs humains dans les coulisses, des cœurs humains dans la salle, des cœurs humains sur la scène » disait Victor Hugo.
Alors, poussons la convention jusqu’au bout, le premier drame sera « représenté » : Cavalleria commencera par la mise en place des comédiens qui joueront le drame de la jalousie, le drame de Santuzza et Tiruddu, par la suite, ils joueront une autre pièce avec les personnages de Paillasse et Colombine et tout basculera dans la confusion entre la fiction et le réel, entre le vrai et le faux .
La religion et ses rites étant présents dans les deux œuvres, Il y aura un constant jeu de miroir entre la représentation théâtrale et la représentation liturgique, entre l’histoire réaliste représentée et l’histoire mythique représentée, entre l’histoire de la passion et l’histoire des passions. La position de la femme est un lien entre les deux ouvrages. Les femmes sont uniquement soumises au pouvoir des hommes, elles leur appartiennent, elles n’existent que sous l’emprise des hommes, les femmes sont broyées par le machisme de l’Italie du Sud.
Cette Italie elle-même qui est écrasée par le soleil, et par cette chape de plomb de l’honneur et du silence. Le silence sous les cris de désespoir de la femme délaissée, de la mère dévastée, de la femme écrasée. Le silence à la fin étouffera les cris. « La commedia e finita ».
Éric Perez
Note d'intention - David Belugou
« Chevalerie Campagnarde », c’est tout l’héritage ancestral, féodal, qui s’enracine dans une campagne sicilienne brûlée par le soleil. Il y a de la noblesse dans la douleur, de la dignité dans la pauvreté. « Paillasses » est l’écho tremblant des lumières de la Ville, cette sœur ennemie de la Campagne, en pleine période d’exode rural.
Ces deux opéras, ancrés dans la réalité la plus crue, annoncent le cinéma qui va naître cinq ans plus tard… trois ans plus tard ! Je pense en construisant mon décor unique à ces paysages fantômes, balayés par l’effroi et la misère, que Stroheim nous fait traverser à la fin de son film « Les rapaces », à ces personnages hagards, aux vêtements chiffonnés, comme taillés à la serpe par de multiples reprises… Nous explorerons ce noir et blanc profond, tragique, de ce cinéma naissant… ce cinéma vériste….
Le village sera là, avec son église et son débit de vin, comme le décor d’un Mystère.
L’église avec ses fastes campagnards, presque carnavalesques dans leur expression véhémente, sera très présente, et la Pâque sera sanglante et théâtrale, comme une tragédie de trétaux. Et devant l’église de Cavalleria Rusticana, les Paillasses auront l’allure échevelée, les fastes rapiécés des saltimbanques felliniens quand ils rejouent les Evangiles au pied de la Croix ( Roma ) ou dans la cour lépreuse d’un patronage catholique ( Juliette des Esprits ).
Deux théâtralités se rejoignent au point névralgique de l’Italie : l’autel comme théâtre.
David Belugou
Distribution
- Mise en scène : Eric Perez
- Direction musicale : Gaspard Brécourt
- Scénographie et costumes : David Belugou
- Lumières : Joël Fabing
- Assistanat à la mise en scène : Yassine Benameur
- * Santuzza : Chrystelle Di Marco
- * Nedda : Solen Mainguené
- * Lola : Ania Wozniak
- Turiddu / Canio (30/07 et 02/08) : Ragaa Eldin
- Turiddu / Canio (05/08 et 7/08) : Denys Pivnitskyi
- * Beppe : Jean Miannay
- * Alfio / Tonio : Dongyong Noh
- Lucia : Gosha Kowalinska
- Sylvio : Jiwon Song
Chanté en italien - surtitré en français
* lauréats du 26ème Concours International de chant de Clermont-Ferrand
Production Clermont Auvergne Opéra, Opéra Éclaté, Opéra de Massy, Reims et Avignon
En partenariat avec l’Opéra de Vichy
REPAS
Menu Opéra à 20h préparé par le traiteur Papa Paella à 22€ (sur réservations).
Presse
La soprano Chrystelle Di Marco endosse la robe de Santuzza, elle fait montre de qualités théâtrales et vocales, nécessaires pour incarner cette jeune femme qui traversent des états d’âmes de plus en plus noires, jusqu’à la mort de son amant qu’elle a provoquée. Si la mode actuelle va à des voix légères, la cantatrice varoise a fait étal de ces capacités de projection sans nuire pour autant à sa ligne de chant, sans tromper les intentions de son personnage, ballotté entre l’amour et la haine. Dans un autre registre, l’Orangeoise de naissance Solen Mainguené s’est glissée avec esthétisme dans le costume de Nedda et de Colombine. Elle a été convaincante quand Colombine ne sait si elle joue ou si elle vit la scène de la jalousie.
Ventoux opéra - Bruno Alberro - mars 2020
Eric Perez, chanteur, comédien et metteur en scène, un artiste aussi passionné que passionnant !
Le Feuillet de l'Opéra - mars 2020