Jean-Michel Rabeux

« À l’origine, je viens de la philosophie, j’ai une licence de philo. Les raisons qui m’ont poussé vers la philosophie sont les mêmes que celles qui m’ont poussé à faire du théâtre : dire non à un état des choses. Mon théâtre, ainsi que le théâtre que j’aime, disent souvent non. Bon, c’est juste dit vite, comme ça. Toutes mes créations, et j’y inclus le montage des textes classiques, toutes sont une recherche en moi pour trouver l’autre, le spectateur, le concitoyen, mon frère, mon ennemi. L’utopie : aller chercher en lui des secrets qui le stupéfient, le mettent en doute sur lui-même et le monde, le rendent plus tolérant, plus amoureux des autres, plus intransigeant contre les Pouvoirs.
Mon parcours théâtral, comme on dit, peut se lire de plusieurs façons, l’une d’elles est la volonté de m’associer à des théâtres, sur une longue durée, pour pouvoir acquérir cette liberté de proposer des formes nouvelles devant des publics les plus nombreux et les plus divers possible. J’ai été successivement associé à la Scène nationale des Gémeaux, à Sceaux, puis à celle de Cergy-Pontoise, à celle de Villeneuve d’Ascq, dans la banlieue de Lille, et enfin à la MC93, à Bobigny.
La complicité avec ces maisons a été très riche et m’a beaucoup appris sur l’articulation entre création et publics. Ce n’est pas totalement un hasard si toutes ces maisons se trouvent en banlieue. Je suis banlieusard, j’aime la banlieue parce qu’elle offre un espace humain où le théâtre me paraît pouvoir servir concrètement à quelque chose, de l’ordre de la réconciliation. Faire battre du sang dans ce tissu urbain, voilà un but !
J’ai eu une également une très longue complicité avec le Théâtre de la
Bastille, dont j’ai d’ailleurs été conseiller artistique pendant deux saisons, et où j’ai joué beaucoup de mes spectacles.
Depuis près de quarante ans que je suis metteur en scène et auteur — ma première mise en scène date de juin 1976 — jamais l’envie de diriger un théâtre ne m’est venue. Je suis plutôt nomade de tempérament. Je n’ai jamais voulu être encombré par la fonction directoriale au détriment de mon travail artistique. Par contre, disposer de notre lieu de travail, le LOKal, est mon ultime plaisir pour les quarante prochaines années. »

Spectacles
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